Charly a le sourire et la décontraction de celui qui aime son métier et qui apprécie qu'on s'y intéresse. Il explique avec patience et clarté au néophyte. Il est même prêt à joindre le geste à la parole. Et là, on est dans une autre dimension. Quand il faut s'attaquer au granit, Charly chausse ses petites lunettes cerclées, se protège les mains avec de gros gants et empoigne l'outil indispensable.
Le granit est dur au mal mais notre homme ne s'en laisse pas conter. C'est tout son corps qui s'exprime face au bloc récalcitrant. C'est une lutte physique intense qui nous ferait presque oublier qu'elle a pour but de façonner la pierre, lui donner une âme, la rendre charnelle si nécessaire. Ah! Cette chaîne en granit. Au toucher, la pierre est revêche et froide mais c'est l'œil qui se régale de ces courbes parfaites, de cet objet « vivant ». Admiratif, on interroge Charly : « En granit! comment est-ce possible?». Le sourire est là, malicieux: « Ça se fait. C’est pas facile mais ça se fait ». Cet homme-là est un dompteur de pierres.
On pourrait presque croire, alors, que le travail du bois est une détente. Balivernes ! Le bois est tendre et fuyant et n'accepte pas les approximations. Qu'il dégrossisse ou qu'il affine, Charly reste concentré et vigilant. Il faut le voir équarrir un tronc en quelques coups maussades. Un bûcheron? Non, un danseur qui donne déjà forme à la matière brute. Quand il peaufine, la gestuelle change, évidemment. Ce sont des petits coups brefs qui se succèdent. Tchac, tchac, tchac.
La main virevolte, aérienne et méticuleuse, harcelant le bois sans répit. Maintenant, un visage figé, sorti du néant, nous observe. Charly est un homme qui donne vie à la matière. Charly est sculpteur.
Damien
